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jeudi 4 novembre 2010

Une promenade à Macerata: interview avec Eva Montanari

L'été dernier je suis allée à Macerata, où l'association Ars In Fabula tient des cours d'illustration pour ceux qui voudraient devenir illustrateurs jeunesse. En effet j'avais été invitée par l'association afin de voir le fonctionnement de leur Master que, à vrai dire, a déjà produit des résultats remarquables quant à projets édités (comme par exemple, pour ne mentionner que les deux plus récents, La Governante de Sara Gavioli, ou la version de I Promessi Sposi, dans l'interprétation d'Umberto Eco pour Scuola Holden, illustrés par Marco Lorenzetti).



Parmi les enseignants des cours il y avait elle: Eva Montanari, une petite fée en chair et os! Menue, gracieuse, toujours souriante, Eva est la personnification de certain de ses personnages. Née à Rimini, Eva a eu un parcours artistique apparemment linéaire et pourtant intense, c'est une des illustratrices italiennes les plus appréciées et publiées à l'étranger: à part l'Italie, elle a publie aussi en France, Espagne, Japon, Taiwan et aux Etats Unis. Parmi les autres, en France elle a publié: Où êtes-vous Monsieur Degas ? pour les éditions L'Atelier du Poisson Soluble (titre originel publié aux USA avec Abrams Books), Baguette magique et chapeau pointu pour Milan Presse, Joyeux Noël Petit Diable! pour Sarbacane et, pour les Editions Oqo, Quelques Gouttes en Ville!

Auteur tout rond, Eva ne s'arrête jamais, elle est en évolution perpétuelle, toujours à la recherche de nouveaux parcours à expérimenter : c'est justement grâce à son innée curiosité qu'elle est arrivée à la sculpture aussi, avec des résultats surprenants et poétiques. Même si elle dit que, enfant, elle était plus intéressée aux ménages qu'à l'illustration…


Mais je vous ai déjà pris assez de temps, partons avec l'interview.

Bonjours à tous, ce matin j'ai le plaisir d'avoir avec moi Eva Montanari, une des illustrateurs, et auteurs italiens, les plus publiés en Italie et à l'étranger. Ciao Eva.

Ciao

Eva, je voudrais partir avec une question personnelle: j'aimerais savoir s'il y a un lieu de ta ville, ou un lieu en tout cas spécial, auquel tu te sens particulièrement liée.

Un lieu de ma ville... Peut-être parce-que c'est l'été et aussi car je suis née à Rimini, à deux pas de la plage, je réalise seulement maintenant que je ne pourrais jamais vivre dans une ville sans la mer. Vivre pour toujours au moins. En réalité j'aime beaucoup voyager, j'aime aussi l'idée de ne pas avoir un seul lieu où m'enfermer, entre quatre murs, quelque chose d'établi disons. Mais, lorsque je reviens à Rimini, je me rends compte que la mer était ce qui me manquait le plus, ce que je rêvais lorsque j'étais très fatiguée, ce dont je rêve en tout cas, l'été comme l'hiver.


Je comprends très bien, même si je suis née dans la pleine du Pô et c'est un peu différent. Quand tu étais enfant, c'était comment ton rapport avec la lecture, avec les livres?

J'ai toujours aimé lire. Ma mère me lisait plein de livres, elle a toujours été une grande lectrice. Mais comme sa famille n'était pas une famille cultivée, mes grands-parents étaient des paysans et ils étaient presque illettrés, chez elle il n'y avait pas un véritable patrimoine en livres, elle allait plutôt les prendre à la bibliothèque. Quand j'étais enfant il n'y avait pas beaucoup de livres à la maison, ma mère nous lisait toujours ceux qu’il y avait avant de se coucher, tant que moi et ma sœur nous les connaissions par cœur. Apres cette première période, j'ai commencé à lire tout ce que je trouvais, à l'école primaire j'ai lu avec avidité la collection entière des policiers d'Agathe Christie. Je n'ai pu comprendre ce que c'était la littérature que plus tard, mais peut-être ça a été amusant de découvrir la lecture ainsi, avec des livres qui n'étaient pas exactement appropriés pour mon age : je me souviens avoir lu aussi quelques-uns des best sellers de Ken Follett. C'étaient des lectures passionnantes car elles traitaient des thèmes d'adultes, et cela a déchaîné mon goût pour la lecture. Je n'ai découvert la plupart des “classiques” que plus tard.


Peut-on donc affirmer que, même si ces lectures n'étaient pas pour ton age, peut-être elles t'ont en quelque manière donné une vision différente des choses...

Je ne sais pas si elles m'ont donné une vision différente. Peut-être que ce qui m'attirait le plus c'était autre chose. Les policiers, par exemple, qui sont tous construits en suivant une structure sérielle, visant toujours à la recherche du coupable, m'attiraient beaucoup plus lorsqu'il y avait une explication de la psychologie des personnages. Ceci me plaisait car, en quelque mesure, il me permettait de tracer une sorte d'éducation sentimentale, ce qui est très important quand on commence à comprendre qu'il y a des gens qui pensent différemment par rapport à nous. Même si, à être sincères, dans certains livres les explications sont assez évidentes: tout est dit et le lecteur n'a pas beaucoup d'espace pour son imaginaire.



Ce que tu viens de dire me fait penser à quelque chose que tu racontais, à propos de ta curiosité vers les personnages des tableaux. Je pense en particulier à un de tes derniers livres, Chasing Degas, où tu es partie d'un particulier d'un tableau pour arriver à un produit fini. Est-ce que cette curiosité, relativement à la psychologie des personnages, peut se transformer dans un 'frétillement' d'auteur à un moment donné?

Les personnes m'intriguent: je me rends compte de comment il est difficile de connaître soi-même déjà, et penser pouvoir interpréter ce que les autres pensent est encore plus compliqué. Certes la leçon de la littérature est un grand enseignement, car elle te permet de vivre des vies qui ne ressemblent la tienne dans le moindre détail, des vies qui ne sont pas fondées sur les mêmes principes et let même aspirations que la tienne. Pour autant que l'on puisse être ouverts à la contamination du monde, nous sommes faits ainsi, nous sommes cette personne là: c'est pour ça que la possibilité de “vivre les vies des autres” m'intéresse. Découvrir comment les personnes réagissent dans des situations particulières me passionne, et me pousse à me confronter avec mes éventuelles possibles réactions.


Chasing Degas, Illustrations © 2009, Eva Montanari. Published by Abrams Books For Young Readers, an imprint of Harry N. Abrams, Inc., New York. All rights reserved.


Eva, tu es illustrateur et auteur de la plus part de tes livres. Ceci m'intéresse particulièrement car, en effet, cela te donne une plénitude artistique, c'est à dire que le produit qui en sort est quelque chose d'absolument personnel. Peut-tu nous raconter comment naissent-elles les idées d'Eva?

Bon, c'est toujours différent. Mais tu le disais correctement: le processus créatif qui origine le livre, plus que le produit fini, c'est la partie la plus belle pour moi. Même si ce n'est pas vrai pour tour les livres dans la même mesure, sur cette intuition initiale s'insèrent des interventions suivantes, des interventions fruit de l'apport critique de ceux qui contribuent à la production d'un livre. Au contraire, le processus créatif qui l'origine, quand on ne sait pas encore ce qui en sortira, quand' on a une illumination et on essaye de l'élaborer, là c'est le moment magique. Parfois les idées ont origine dès quelque chose qui se passe et qui ne t'abandonne pas, parfois c'est des images te suggérant un parcours.

Souvent, ceux qui me connaissent bien, en regardant des tableaux que j'ai faits, m'ont dit qu'ils y reconnaissaient quelque chose qui m'appartenait profondément. Les images, et les histoires que l'on invente sans un but précis, étonnent en premier leurs créateurs. Il y a des métaphores, apparemment inoffensives, qui dévoilent des contenus autant mystérieux pour le public que pour l'artiste. C'est charmant.

Chasing Degas, Illustrations © 2009, Eva Montanari. Published by Abrams Books For Young Readers, an imprint of Harry N. Abrams, Inc., New York. All rights reserved.

Comme j'ai eu l'occasion de faire ta connaissance, je dois dire qu'en effet il y a une correspondance entre la grâce de tes illustrations et la personne. Tes images sont toujours pertinentes et, en même temps, elles ont aussi un sens de grâce, d'harmonie de composition.



Chasing Degas, Illustrations © 2009, Eva Montanari. Published by Abrams Books For Young Readers, an imprint of Harry N. Abrams, Inc., New York. All rights reserved.

Je sais que maintenant tu tiens des cours pour les jeunes qui voudraient commencer ce métier: sans doute beaucoup d'entre eux ont des idées mais, parfois, ils ne savent pas comment les développer. Justement tu es auteur et illustrateur, comment peux-tu les aider?

Dans les cours je parts toujours avec un exercice qui est aussi une sorte de jeu. Dans le passé, par exemple, nous avons fait des études d'anatomie ensuite élaborés; l'année passée j'ai même mimé des situations, faisant semblant d'être triste, effrayée, en colère, mettant en scène des drames, faisant semblant de m'arracher les cheveux…






Ces études d’après nature ont ensuite été la base d’un travail d'élaboration. Le “jeu” de cette année était de choisir des mots du dictionnaire au hasard et, ensuite, essayer de “centrer” littéralement la définition avec une image. Ceci était le départ. Je les fais dessiner beaucoup. Nous sommes partis avec la lettre A et, ce matin, nous sommes déjà à la lettre G, et pourtant je peux voir des changements déjà, des mains se sont débloquées, des esprits se sont ouverts. Par rapport à l'application d'une technique de manière précise et scolastique, ce que j'aime moins enseigner car c'est déjà un passage suivant et un parcours de recherche très personnel, dans ce moment je voudrais qu'ils laissent émerger leurs personnalités.

Je les fais esquisser beaucoup et en vitesse, ils ne doivent pas poursuivre le beau dessin mais l'idée, car je pense que c'est dès ce type d'exercice que la personnalité de chacun peut sortir. Apres une inévitable phase de bloc, c'est exactement d'un petit et géniale croquis que, d'habitude, naît l'incipit pour une idée narrative à transformer dans un story-board dans le peu de temps qui nous reste à disposition. La première étape du cours de cette année c'était de créer un dictionnaire personnel dans un petit bloc-notes dédié aux croquis.

L'étape suivante sera de reconnaître, parmi ces croquis (pas de beaux dessins, pas de clair-obscur et néanmoins de couleurs pour le moment!) une trace à développer que, j'espère, sera comme une petite semence germée pendant le cours, un grain qu'ils continueront à arroser et à soigner, lorsqu'ils seront tous seuls à la maison.


Très intéressant car, souvent, lorsqu’on commence on pense devoir faire immédiatement des dessins fantastiques, finis, techniquement parfaits, tandis que c'est cette recherche, de soi aussi, qui est à la base de votre travail.

Oui, le départ est très frustrant je crois.
Ceux qui peuvent déjà dessiner assez bien sont ceux qui ont les difficultés majeures.
Paradoxalement, les étudiants qui tiennent les crayons dans les mains comme s'ils étaient des bâtons, lorsqu'ils voient la main se dénouer lentement et les images sortir comme par magie, sont les plus satisfaits.
Les étudiants qui sont déjà à un bon niveau ont de la peine à se dégager de cette envie de démontrer (à soi même en premier) qu'ils peuvent faire un beau dessin.
Ainsi qu'il est difficile, pour un illustrateur professionnel, de se libérer de ses modalités, de ses schémas.




Ce parcours m’intéresse beaucoup: la recherche de soi ne s’arrête jamais, du point de vue technique aussi en quelque manière, mais surtout du point de vue de l’approche à l’image, à l’idée. Peux-tu nous parler un peu de l’évolution de ton art. Je sais que tu es en train de faire de choses vraiment remarquables, avec la sculpture aussi, de recherche d’image et de développement de ce qu’était ton début, c’est une évolution importante.

Merci, en effet la chose qui m’intéresse le plus c’est exactement ce type de recherche. J’ai toujours eu le souci de ne pas avoir étudié beaucoup et pour trop peu de temps!), je pensais avoir appris peu enfin (j’aurais voulu m’inscrire à Lettres mais en même temps j’avais envie d’inventer, de créer. Pour des vicissitudes familiales je ne pouvais pas rester longtemps à l’Université, je devais comprendre vite ce que je voulais faire et, heureusement, j’ai su choisir).

Ensuite, le long des années, j’ai compris que la vraie fortune de faire ce métier, consistait plutôt dans la possibilité d’apprendre continuellement, et de pouvoir œuvrer sur soi-mêmes. Une progression professionnelle est possible dans presque tous les métiers, mais ce qui est décidément « difficile » c’est d’avoir la possibilité de tout bouleverser, de but en blanc.
 


Avec ce métier j’ai découvert l’infinie possibilité






A Very Full Morning, Eva Montanari, Houghton Mifflin Books 2006

d’approfondir ce qui m’intéresse.

J’ai rattrapé des sujets que j’avais laissés suspendus, je les ai mis dans le grand pot, les mélangeant avec des nouveaux ingrédients et j’ai attendu de voir ce qu’il en sortait.

En tout cas, bosser sur soi peut être aussi déstabilisant, car on n’est pas capable de le faire, car il s’agit de quelque chose de nouveau, car on essaye d’explorer des terroirs inconnus sans savoir où ils te conduisent. C’est la raison pour la quelle je pense qu’il est important de toujours garder un oeil à l’arrière, à ce que nous étions lors de la décision de tout remettre en jeu. Il est aussi important d’essayer de comprendre ce qui est « bien », car peut-être cela nous donne de la joie et nous relie au fil magique de l’enfance. Ce serait fantastique si l’on pouvait récupérer une partie de cette joie enfantine et la transformer en quelque chose de nouveau. C’est plus ou moins ce que j’essaye, ou que je pense faire.

Donc, effectivement, on ne jette jamais rien. En réalité tout reste, tout revient, mais avec une nouvelle pulsion vers une évolution.

Oui, c’est l’émotion de voir quelque chose de nouveau qui naît. C’est ce qui se passait lors de mes premières expériences où, parmi les frustrations et les croquis recroquevillés, par hasard, j’ai trouvé le chemin qui finalement me correspondait.

A Very Full Morning, Eva Montanari, Houghton Mifflin Books 2006

À l’école je me souviens avoir essayé plusieurs techniques: par exemple je me souviens avoir été passionnée d’aquarelle pour ensuite découvrir que ce n’était décidément pas mon choix. Au départ il y a toujours un grand écueil, celui d’avoir dans la tête des milliers d’images qui ne filtrent pas dans le bras, ils n’arrivent pas à la main et ils ne veulent pas sortir ! Ensuite, à un moment donné, il y a un processus envers où c’est la main qui suggère les idées qui arrivent à la tête pour être élaborées, enrichies et transformées pour revenir enfin à la main. C’est un mécanisme circulaire. Quand l’on découvre cette voie secrète on se sent bien heureux, il te semble que de cette sorte de passage magique puissent arriver des idées, des histoires, des images à l’infini.

En réalité, si l’on se laisse prendre par ce mécanisme, les mêmes personnages que l’on avait déjà connu il y a quelques temps reviennent toujours, peut-être qu’ils ont laissé pousser des moustaches, ou qu’ils ont mis un chapeau à cacher les yeux. Pourtant, en définitive, ils n’ont rien de nouveau à raconter. Dans ce cas l’écoute est fondamental: si nous avons arrêté d’écouter et de regarder, il faut recommencer. C’est un renouvellement perpétuel.


Très souvent, vis-à-vis des difficultés, les personnes s’effrayent et ont la tendance à se bloquer. Mais tu es en train de me dire que, dans quelques cas, la difficulté peut être salvatrice, que cela peut être le début pour quelque chose de différent.

Pour moi la difficulté est salvatrice, enfin peut-être que je le dis à cœur léger dans le sens que pour moi elle est salvatrice dans l’art, dans le dessin, dans l’écriture, alors que cela m’effraye beaucoup dans la vie! Il est bien plus facile de se mettre en jeu sur une feuille de papier où, si quelque chose ne marche pas, l’on peut tout jeter pour recommencer à nouveau. Dans un parcours artistique, c’est toi qui es en jeu, toi seulement avec tes possibilités.
Dans la vie il y a aussi d’autres personnes et leurs vies.
Je dois admettre que, dans la vie réelle, je suis souvent effrayée.

Tempo d'Instabilità, Eva Montanari, Tricromia, 2010

Je pense que c’est humain, sinon tu serais une machine parfaite. En revenant à notre discours précédent: j’ai eu l’occasion de voir tes sculptures, splendides, pourrais-tu nous dire quelque chose à ce propos?

Oui. Depuis des années, lorsque j’avais un peu de temps, je m’amusais à voir comment les personnages, que d’habitude j’essaye de faire tridimensionnels sur papier, pouvaient devenir tridimensionnels dans l’espace. Pendant que je faisais ces expériences, j’avais toujours des idées narratives dans ma tête car, pour moi, les images amènent toujours une histoire avec elles...

Tempo d'Instabilità, Eva Montanari, Tricromia, 2010
Comme je ne suis ni peintre ni sculpteur, chaque oeuvre a été le point de départ pour quelque chose, peu importe si c’était un conte ou une simple illumination: j’espérais que ces personnages pouvaient en quelque manière se raconter. D’après ce principe j’ai crée un livre où tous les personnages se promènent un parapluie dans la main: j’ai imaginé les habitants d’une ville, encadrés du haut et un peu cachés par leurs abris, à peine touchés par quelque goutte de pluie qui les accompagnent un instant pour s’évaporer enfin.



Ce dernier livre dont tu fais référence est sorti en Espagne et en France [pour OQO Editora] n'est ce pas?



Oui, mais il sortira en Italie aussi.




Avec quel éditeur?

Avec Logos, le titre est “Quante gocce in città







Dernière question: as-tu quelques nouveaux projets en chantier?

Oui, j’ai un projet presque accompli, même si le coté technique n’a pas encore été défini. Mais c’est un projet que j’ai temporairement mis de coté et que je voudrais reprendre après. J’aimerais qu’un peu de temps se passe pour le regarder à nouveau avec du calme et vérifier si tout « fonctionne ». J’y ai bossé pour pas mal de temps et il s’agit de quelque chose de très différent par rapport à ma production précédente. Puis il y a d’autres petits projets auxquels je suis en train de travailler, c’est enfin des projets plus en ligne avec mon parcours précédent que, tout de même, me passionnent. Au contraire le premier projet dont je te parlais est absolument nouveau, je dois avouer qu’il m’a vachement surprise.

A ce point je suis très curieuse, je voudrais tout voir!

J'ai les dessins ici, je peux te les montrer si tu veux, ainsi tu me donnes ton opinion.

Bah oui, je le sais, je suis privilégiée, si vous m'enviez énormément sachiez que je le comprends très bien. Eva, je te remercie vraiment pour ta disponibilité et générosité dans cette conversation, j'espère que ton témoignage peut illuminer ceux qui pensent entreprendre ce métier. Ce n'est pas facile de trouver une confrontation avec un auteur déjà affirmé. Ça a été un véritable plaisir de faire ta connaissance et de pouvoir parler avec toi. Merci.

A toi.



Une petite remarque à l'interview:

* D'autres fantastiques sculptures, avec des tableaux aussi, qui ont été le sujet d'une exposition en octobre 2009, ont inspiré la publication d'un charmant volume titré Tempo d'Instabilità, pour Tricromia
Fil conducteur des œuvres le temps, dans son acception plus vaste, un temps métaphysique, intérieur, désuet, un temps de changements!

Tempo d'Instabilità, Eva Montanari, Tricromia, 2010


Le Pivot Questionnaire de Seven Impossible Things Before Breakfast:
 
7-Imp: Quel est ton mot préféré?

Incongruo = Inadéquat.


7-Imp: Et celui que tu aimes le moins?
Ineluttabile = Inéluctable.


7-Imp: Qu'est-ce qui allume ta créativité, spiritualité ou émotivité?
La “beauté” rencontrée par hasard.
L'envie de raconter et d'inventer qui arrive à chaque fois inattendue.


7-Imp: Qu'est-ce qui t'étend?
Oublier quand c'est le temps de changer.
L'enracinement d'habitudes agissant à ma place.


7-Imp: Quel est ton gros mot préféré?
“Porca paletta!” [il n'y a pas de traduction correspondante, la traduction littérale serait “putain de palette”]
Ce n'est pas vraiment un gros mot mais, plutôt, un mot “qu'il vaut mieux ne pas répéter” comme me l'expliqua ma mère lorsque, âgée de cinq ou sis ans, elle m'a entendu répéter une des expressions qu'elle disait fréquemment. Sauf: moi je connectais ce mot à la palette verte que nous utilisions pour ramasser la poubelle.

Vas savoir pourquoi porca?

Tempo d'Instabilità, Eva Montanari, Tricromia, 2010

7-Imp: Quel est le son ou brouit que tu aimes le plus?

A l’aube, les discussions entre oiseaux qui s'insinuent dans les rêves.
Qui est-ce qui a raison?
Qui est-ce qui fait semblant?
Qui est-ce qui nie?


7-Imp: Lequel tu détestes?
bruummmmmm


7-Imp: Quelle profession, exception faite pour la tienne, voudrais-tu expérimenter?
Parfois j’ai l’impression de simplement seconder mes inclinations et mes désirs, je ne sais pourtant pas dire si j’ai le droit d’appeler la mienne une vraie « profession » …
Et tout ce que je voudrais essayer à peu en commun avec une vraie “profession” enfin.
J’ai tendance à faire cette distinction car mes parents avaient une pâtisserie, où moi aussi j’ai bossé pour quelques temps. Quand je me réveille, effrayée, en me demandant si je suis en train de faire toujours et seulement ce que je désire, je reviens à ces jours à la pâtisserie.
Seulement maintenant j’arrive à attribuer la juste valeur à ces incursions que je fais dans le concret.

Tempo d'Instabilità, Eva Montanari, Tricromia, 2010


7-Imp: Lequel tu ne voudrais jamais faire?

Je crois que je serais mécontente dans tout boulot qui n’ait pas d’aspect créatif aussi (entendu comme «invention»), mais qui sais: peut-être, si je faisais un bulot plus pratique, je pourrais retrouver ce temps mystérieux duquel je n’ai que des mémoires vagues, ce que l’on appelle le temps «libre». Ce temps magique que je pourrais employer en essayant de faire ce que je fais maintenant et que, parfois, j’appelle «métier».
Ce serait un temps précieux.
Et peut-être je serai heureuse.


7-Imp: Si le paradis existe, qu'est-ce que tu voudrais que Dieu te dise lors de ton arrivée?
-Tu peux faire un tour et repartir-
(si Dieu sait tout, il devrait savoir que j'ai laissé quelque chose à terminer…)



Un merci spécial, pour avoir permis l'utilisation des images, va aux éditeurs: Abrams Books, Houghton Mifflin, OQO Editora, Tricromiaà Ars In Fabula pour la collaboration et l'assistance exquise.



Copyright© texte et images comme sur les mêmes. Les images ont été reproduites avec la permission des Editeurs, toute reproduction étant interdite.

3 commentaires:

  1. A truly enriching gift for us, so great Eva Montanari art...!
    but also...
    Grazie Cristiana, your work is huge, admiring!

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  2. Un magnifique interview et focus sur cette artiste. J'avais hésité à prendre son livre su DEgas, la prochaine fois je l'achète d'office.
    J'ai aussi beaucoup appris de cette créativité. De ce geste qu'il ne faut pas finir dans la beauté. de ce temps d'exercice et de ces idées qui reviennent au fur et à mesure et se retrouvent en plein maturité...
    Tu me redonnes envie d'écrire et d'illustrer... à si j'avais cette enseignante, un vrai bonheur.
    Merci

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  3. @Stel.la: Thank you so much. About Eva you are right, she is an extremely talented artist and a lovely woman, wise, clever and very caring about others.
    @Vanessa: Merci, merci, merci! C'est vrai qu'Eva est quelqu'un de spécial, un enseignant très attentive envers ses étudiants, une femme très sensible. Merci encore!

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