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dimanche 14 novembre 2010

Inattendu

Inattendu est ce post, car il arrive hors de tout programme que j’avais fait, mais ça va sans dire: les coups de foudre arrivent toujours inattendus, e ceci n’est pas une exception.

Comme toujours je suis en retard, pour ignorance, pour une blague du destin ou pour d’autres raisons aux quelles je ne peux pas penser, aujourd’hui aussi j’arrive en retard, mais ce qui compte c’est que j’arrive tout de même. J’arrive à travers mes sentiers tordus et ombragés, perdue entre le brouillard de saison et celui intellectuel, je viens vous présenter un CHEF-D’ŒUVRE


Robinson Crusoe, de Daniel Defoe, illustré par Tullio Pericoli, Editions Adelphi, 2007


Les morceaux de texte contenus dans le livre ont été sélectionnés par Anna Maria Lorusso.

En réalité l’idée originaire du livre nous la devons à Olivetti, car ils avaient l’habitude de faire hommage à leurs clients les plus prestigieux de cadeaux exclusifs, c’est à cette occasion qu’ils commandèrent une édition en tirage limité du roman de Defoe: c’étaient les années quatre-vingt, entre 1982 et 1984 et, comme Pericoli lui même raconte dans la préface du livre, et il vivait une difficile phase de transition, partagé comme il était entre les illustrations pour les journaux et le monde des galeries d’art, entre l’illustrateur-dessinateur et le peintre. Son conte est très beau, surtout la manière dont il explique comment le fait d’illustrer ce livre l’aida à retrouver une unité artistique que, jusqu’à ce moment, lui était barrée, niée par cette dichotomie expressive qui voulait le monde de l’illustrateur et celui du peintre séparés à la source. Comme il nous raconte, Robinson Crusoe pénétrait les deux mondes expressifs que, à cette époque, étaient l’objet de ses recherches : l’homme, sujet principale des illustrations pour les journaux, et la nature, sujet préféré dans les tableaux. Dans Robinson Crusoe les deux éléments se fondent et se confondent presque, et cette oeuvre d’agrégation est bien évidente dans les tableaux qui accompagnent le roman.

Dans cette nouvelle version, publiée par Adelphi, nous retrouvons une quantité supérieure d’illustrations par rapport à la version d’Olivetti, ce qui montre une recherche artistique de grand intérêt.

Seule critique que je me permets de faire, concerne la presque totale absence du personnage de Vendredi: dans le roman de Defoe Vendredi avait bien son importance et, honnêtement, j’aurais voulu le voir représenté également car, lui aussi, est expression de l’île autant que les arbres, les poissons, les oiseaux et les pics verts. Vendredi est l’ombrageux Caliban de La Tempête de Shakespeare, il est le point de fusion parfaite entre home et nature: il représente l’archétype du sauvage auquel est dédiée toute une courante littéraire et, à mon avis, il méritait plus d’attention. C’est bien vrai que Pericoli nous raconte combien, pour lui, Robinson et l'Ile représentaient les deux protagonistes absolus du roman: moyen parfait pour compléter cette fusion entre journaux et galeries d’art, illustrateur et peintre, homme et nature, en donnant à l’un les caractéristiques de l’autre et vice-versa le processus était complet. Vrai aussi que dans le roman de Defoe, bien qu’il soit important, Vendredi a tout de même un rôle mineur par rapport à Robinson, très loin de la superbe interprétation de Michel Tournier dans Vendredi ou les limbes du Pacifique où il a un second rôle, quand il n’est pas la voix de la conscience du blanc Robinson.

En tout cas, cette absence n’arrive pas à compromettre irrémédiablement la beauté de ce livre qui reste, à mon goût, un chef-d’œuvre de rare beauté.





*Il n’y a pas beaucoup de renseignements sur Tullio Pericoli, je vous ai mis ce que j’ai trouvé en anglais:

Life of Guangzhou -http://www.lifeofguangzhou.com/node_10/node_35/node_116/node_118/2009/11/02/125715172171163.shtml
Lambiek.net - http://lambiek.net/artists/p/pericoli_tullio.htm (à propos de ses bandes dessinées)


L'Editeur Corraini vient de publier un nouveau livre où l’on prend en examen l’évolution dans ses ouvrages dédiés aux paysages, titré “L'Infinito Paesaggio”, ce qui serait intéressant de confronter avec les atmosphères des paysages de son Robinson. Vous pouvez trouver le livre de Corraini ici.

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