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vendredi 21 mai 2010

Vango

Je sais, je sais, j'ai failli commettre un péché mortel et maintenant je me sens irréparablement orpheline: Vango m'a abandonnée, maintenant il est sur l'île de Salina avec Ethel, et moi? Combien de temps faudra-t-il que j’attends? Un an? Plus que ça?

Jamais, je répète, JAMAIS lire le premier tome d'un roman de Timothée de Fombelle sans que le deuxième n'aie déjà été publié: le risque est de rester agonisants, dans l'impatience de savoir ce qui se passera et vous n'aurez autre choix qu'attendre. Relire le premier volume ne vous soulagera pas, bien au contraire: cela augmentera ultérieurement cette soif de découverte qui vous dévore déjà abondamment.

Quoi faire alors? Bon je me défoule en écrivant un post sur ce beau roman, fruit de la plume magique du même auteur de Tobie Lolness *, et composé justement de deux volumes: Vango, entre ciel et Terre et Vango, un prince sans royaume. Probablement le deuxième tome sortira en Italie l'année prochaine.









Vango, Timothée de Fombelle, illustration de couverture de Blexbolex**, Gallimard Jeunesse, Hors Série Littérature, 18-03-2010

Pour lecteurs à partir des 12 ans

Le roman est situé dans les années trente, dans une Europe à cheval entre les deux guerres, déjà amplement soumise par les régimes totalitaires que, dans quelques années, finiront par bouleverser les vies de millions de personnes. Mais pour Vango Romano, les problèmes menaçant sa jeune vie n'ont rien à voir avec ces événements dramatiques: le mystère qu'entoure ses origines sera la première source des malheurs qui le poursuivent dès son enfance lorsque, naufragé, il aborda sur l'île de Salina avec Mademoiselle, sa nourrice.

De Vango Romano, appelé aussi L'Oiseau par ses persécuteurs, nous ne savons presque rien sauf qu'il a toujours sur soi un foulard en soie bleue avec l'écriture "Combien de Royaumes nous ignorent" et un V brodé en or, qu'il aime les hirondelles, qu'il est capable de grimper sans fatigue même dans les lieux les plus inaccessibles et que, faute la police qui l'ensuit pour avoir assassiné un homme et quelqu'un qui lui tire dessus, il aurait pris les vœux. Nous savons aussi que Mademoiselle l'a élevé et aimé comme un fils, et qu'elle l'a toujours protégé de son même passé.

Autour de Vango tournent des personnages historiques comme Hugo Eckener, le capitaine du Graf Zeppelin, et personnages inventés comme Zefiro, le moine en chef du couvent secret se l'île d'Arkudak (Alicudi) ou comme la Taupe, une jeune fille juive de bonne famille qui partage avec Vango l'indépendance et le goût pour les nuits en plein air sur les toits de Paris. Et puis il y a Ethel, Ecossaise, riche, jeune et profondément amoureuse de Vango. Pour terminer il y a ses ennemis, terribles, impitoyables, un pour tous: Staline! Oui, sans blague: le tyran soviétique en personne.

A ce point, même trop facilement, ma tête s'en est partie vers la famille impériale des Romanov: du reste Vango Romano, le moment historique correspond aussi... Et pourtant, vers la fin du roman, ma théorie s'écroule comme un château de sable mal bâti!

Quoi dire, si non que De Fombelle a une habileté indéniable dans la construction d'intrigues compliqués et chargés de suspens? Les petites chevilles, éparpilles avec maîtrise le long du roman, ne restent que vaguement amorcées jusqu’au moment où l'auteur a choisi; a ce moment là, et seulement à ce moment, elles explosent dans toute leur évidence. L'écriture pressante et évocatrice t'enveloppe dans une soif de découverte qui ne t'abandonne pas, jusqu'au bout. L'auteur est incroyablement habile dans la création d'un climat de tension, en utilisant plusieurs techniques, en tissant avec maîtrise les fils du raconte, en coupant l'action au climax pour aller ailleurs, déplaçant l'attention sur des événements mineurs ou utilisant la technique du flash-back.

Enfin: un roman à ne pas perdre, vous n'en serez pas déçus!

De ce nouveau livre De Fombelle a dit: «J'ai mis dans ce roman tout ce qui compte pour moi : le souffle de l'aventure, la fragilité, la cruauté la beauté des existences. Je voulais une saga qui emporte le lecteur, mais qui laisse chez lui des traces.»

Pour ceux qui encore ne le connaissent pas, ou assez, et pour vous donner une idée de la réception du travail de De Fombelle, je vous mets de suite quelques reconnaissances qu'il a obtenues dans les dernières années:

Prix du Souffleur 2002
Prix Saint-Exupéry 2006
Prix Tam-Tam 2006
Prix Sorcières 2006
Grand Prix de l'Imaginaire 2007

Vous pouvez lire aussi quelques infos biographiques, et une brève interview, sur le site de l'Editeur Gallimard:  http://www.gallimard-jeunesse.fr/3nav/contenu.php?page=contributeur&tri=titre_resume&num=1&id_contributeur=67631


A vous le choix maintenant: acheter le volume hic et nunc ou attendre la sortie du deuxième tome?




* L'histoire de Tobie Lolness sera bientôt transposée en pellicule. En effet, ces derniers mois, De Fombelle est en train de bosser sur le scénario du film, en réalisation prochainement aux Etats Unis.

** Blexbolex est le fantastique auteur et illustrateur de Saisons, livre merveilleux sorti en novembre dernier par les Editions Albin Michel Jeunesse.

jeudi 13 mai 2010

AU SECOURS: Editions Être en danger!

Ce matin, en regardant sur le net (et plus précisément sur le Blog La Citrouille) je découvre avec stupeur la lettre que je vais, à mon tour, publier ici dessous. Tout ce qu'il fallait dire a déjà été écrit par M. Bruel, j'aide seulement ma prière personnelle de ne pas laisser tomber cet appel, chers lecteurs.



"Le risque ou dormir


C’était l’anagramme de mon ancienne maison d’édition
Le Sourire qui mord

Invité à débattre sur le thème « Résister, à quel prix ? » lors de la journée professionnelle organisée le 7 mai 2010 par la Fête du Livre de Villeurbanne, j’ai d’emblée, à la demande de Gérard Picot qui venait de l’apprendre, annoncé publiquement l’arrêt prochain des éditions Être.

Éditer depuis plus de trente-cinq ans, sans capital, des albums jeunesse singuliers plutôt exigeants a toujours relevé de l’aventure. Et sans le soutien attentif de nombre des partenaires de la chaîne du livre, les lois du marché auraient eu raison plus tôt de cet équilibrisme.

En des temps qui ne sont faciles que pour quelques nantis, qu’un léger fléchissement de la vigilance professionnelle puisse nous être fatal a pourtant suscité l’émotion. J’ai été très touché, sur place et depuis, par les nombreux encouragements à tenir et par l’engagement de ceux qui ne pouvaient se résoudre à ce que la présence de nos livres dans le paysage éditorial aux côtés des lecteurs jeunes et moins jeunes, ne soit pas assurée. Que faire ?

Je ne peux que vous inciter, les uns et les autres, à vous précipiter dans vos librairies préférées pour vous procurer les albums d’Être éditions pendant qu’il en est encore temps. Si une vague d’achats ne garantit peut-être pas la poursuite de l’activité, elle assurera un destin à des livres qui considèrent les enfants comme des lecteurs à part entière méritant des points de vue non altérés sur le monde. Qu’ils puissent encore, ces albums, susciter de libres interprétations et la résistance à l’ordre des choses, je nous le souhaite. Et nous le devons aussi aux créateurs qui ont partagé le risque de ces aventures littéraires et humaines.

« Ce qui vient au monde pour ne rien troubler ne mérite ni égards ni patience » écrit René Char.
Je vous remercie de la vôtre.
Et je n’ai pas sommeil…

Christian Bruel

10 mai 2010

contact@etre-editions.com

Être éditions
56, rue Ramus
75020 Paris
http://www.etre-editions.com/

Rejoignez le groupe de soutien à Christian Bruel sur facebook :
http://www.facebook.com/group.php?gid=120683554618391&v=wall " *



Je termine en répétant, comme d'habitude, que


la culture est liberté: défendons-la!


*La lettre que je viens de publier a été reproduite avec la permission de M. Bruel.